La fabrication du katana

Katana (刀 : sabre japonais)

Symbole de la caste des samouraïs, le katana est un sabre (arme blanche courbe à un seul tranchant) de plus de 60 cm. Il est porté glissé dans la ceinture, tranchant dirigé vers le haut (vers le bas si le porteur est un cavalier). Porté avec un wakizashi, ils forment le daisho.

Certaines périodes de l’histoire japonaise étant plus calmes, le katana avait plus un rôle d’apparat que d’arme réelle. Le katana est une arme de taille (dont on utilise le tranchant) et d’estoc (dont on utilise la pointe). Par extension, le terme katana sert souvent à désigner l’ensemble des sabres japonais (tachi, uchigatana, etc.).

Le katana a une taille supérieure à 60 cm, mais peut varier selon les périodes et techniques de guerre. Il se manie généralement à deux mains, mais certaines techniques, comme la célèbre technique à deux sabres de Musashi Miyamoto, ou des techniques impliquant l’utilisation du fourreau, supposent le maniement à une main. Sa poignée (tsuka), suivant le climat politique, variait entre la largeur de deux ou trois mains. La tsuka se termine par une garde (tsuba) qui protège la main. Le poids d’un katana standard varie de 800 grammes à 1300 grammes.

Dans l’idéal, le katana est une oeuvre d’art. Une pièce unique.

En voici, le cahier des charges : il ne doit ni casser, ni se tordre tout en gardant son tranchant. Il doit donc être très dur tout étant relativement souple. En métallurgie, ces propriétés s’opposent. Les anciens forgerons ont donc imaginé et mis au point un processus très complexe pour aboutir à une lame quasiment parfaite. La fabrication d’un sabre japonais prend un peu plus d’un mois : un mois de forge, et une semaine de polissage.

Tout commence avec la production d’acier brut appelé tamahagane obtenu par réduction dans le tatara. Le procédé pour obtenir cet acier est unique au monde. Le minerai, déjà soigneusement choisi est fondu avec un mélange de sable ferrugineux et de charbon de bois.

Dès cette étape, le savoir-faire des maîtres forgerons intervient, avec pour chaque atelier des différences dans la composition et l’assemblage des matériaux.

En revanche, tous partagent en commun l’énorme travail nécessaire pour obtenir de quoi forger une lame. En effet, seul un infime pourcentage de minerai sera transformé en acier brut. On l’estime ainsi, de 1% à 10% (au maximum) du poids de départ. A ce stade, nous sommes déjà dans l’excellence.

Les morceaux de métal ainsi produits sont cassés en petits bouts de 3 a 5 cm. Le forgeron les triera selon la teneur en carbone, c’est à dire selon la dureté de chaque fragment.  Les morceaux durs (hadagane ou kawagane) contenant plus de carbone sont utilisés pour l’enveloppe, et les morceaux plus tendres (shingane) pour le noyau.

Puis, le maître artisan (certains portent le titre envié de trésor national vivant) assemble le tout en forme de brique, pour le chauffer sur un feu de charbon de bois.

A bonne température, on aplatit cette masse avec un marteau en un bloc compact, qui est trempé dans l’eau et pulvérisé en petits morceaux.

Cette opération peut être répétée plusieurs fois. Au moment où, le forgeron estime sa brique de métal prête, il la chauffe à blanc pour la forger sur l’enclume en pliant et repliant le métal de nombreuses fois.

Ce processus de forge et de pliages successifs, permettra à l’acier de se débarrasser de ses impuretés, tout en uniformisant sa teneur en carbone. Le résultat doit être impeccable : les différentes couches de métal sont soudées entre elles.

Bien sûr, chaque atelier a sa méthode pour travailler le métal. Ce travail sera visible plus tard sur la lame, avec ce que l’on nomme le grain de l’acier. Chaque fois que le métal est plié, les couches d’acier se superposent. On arrive donc assez vite à un nombre très important. Néanmoins, ce nombre de pliages a une limite, car à partir d’ un certain stade l’acier perd en dureté. Là encore, chaque maître possède son secret.

Pour répondre aux critères de dureté et de souplesse, le sabre est fait d’acier composite : le tranchant et l’enrobage sont faits d’acier très dur, alors que le coeur et le dos sont faits d’acier plus doux. Lorsque le forgeron est en possession des deux qualités d’acier qu’il recherche, son but est d’enrober l’acier doux de la couche plus dure. Là encore, les méthodes pour réussir cette technique peuvent varier suivant les artisans. Une fois la forme de la lame obtenue, on arrive au stade de la cuisson et de la trempe. Ce travail est très délicat. En effet, il faut veiller à ce que le tranchant soit plus dur que le reste de la lame.

Pour cela, la lame est recouverte d’un mélange d’argile, de poudre de charbon de bois et des petits secrets de chacun… (Le problème principal du forgeron est de maintenir l’équilibre entre la capacité de coupe et la solidité. Un sabre coupant signifie souvent qu’il est fragile car la trempe nécessaire pour un bon aiguisage fragilise la lame. D’un autre côté, une lame trop “souple” risque de ne pas couper correctement. Le sabre japonais a résolu ce problème avec élégance car chaque détail de la technique de forge participe à l’équilibre de la lame).

La lame est chauffée une nouvelle fois sur un feu de charbon de bois. Puis, la bonne température atteinte, elle est plongée dans l’eau. Le tranchant, moins protégé par une mince couche d’argile, se refroidit plus vite que le reste du métal, et acquiert sa dureté définitive. Entre les deux parties de la lame, apparaît, bien visible, la ligne de trempe. Sur la partie la plus trempée, le choc thermique transforme l’acier en une structure appelée martensite. Il s’agit de fins cristaux extrêmement durs qui expliquent le redoutable tranchant des nippon-tô.

Suivant le résultat que le forgeron veut obtenir, il peut retoucher légèrement la courbure. Puis la lame est grossièrement polie, pour lui donner son fil.

A ce stade, si le maître est satisfait du résultat, il donne la lame au polisseur, qui finit le sabre.

On le voit, la forge d’un katana est un art; d’autant plus que , la réalisation peut avorter à tout moment de l’un des stades. Il n’est donc, pas étonnant que les belles lames soient rares. Même le meilleur forgeron peut en rater une.

Malgré tout, avec les connaissances actuelles en métallurgie, l’expertise des grands maîtres du passé est rarement égalée.

Une fois le sabre poli, on lui fabrique un shira-saya. Le shira-saya est un fourreau très ajusté sur la lame, qui la protège bien des chocs éventuels mais surtout de l’humidité. Traditionnellement, le bois utilisé est du magnolia blanc. Le bois devra être sans défauts et sans noeuds. Eventuellement avec une koshirae plus formelle, suivant les goûts et désirs du propriétaire…


Pour en savoir plus :
http://www.nihon-token.com/generalites/fabrication/finitions.html